Ces entreprises qui ont fait l'Algérie : l'usine Louis CASTAN

L’usine Louis Castan est une des plus vieilles et plus honorables firmes de l’Algérie. De tous temps, le nom de Castan a représenté, dans le domaine des travaux publics, le nom du fabricant de carrelages, carreaux, tuyaux en ciment et autres produits manufacturés similaires.

M. Castan père était, en effet, une personnalité très connue dans le monde du commerce. Sa grande probité, sa bonhomie et ses connaissances particulières des transactions en général l’avaient fait désigner par ses collègues comme président de la Chambre de commerce. Il dirigea pendant de longues années les travaux de cette assemblée avec une compétence indiscutable, et surtout avec une affabilité à laquelle chacun se prêtait à rendre hommage.

La création de la Maison Louis Castan remonte à 1881, époque où la firme Veuve Reynaud et Cie, de Narbonne, vient jeter les bases de l’installation d’une manufacture de carrelages.

A M. Louis Castan père, succède peu de temps après M. Louis Castan fils. A partir d’avril 1925, M. Jean Galéa, ancien industriel de Maison-Carrée, prend la suite de cette industrie.

Bien que de date très ancienne, cette maison possède un matériel très moderne et une main-d’œuvre spécialisée d’une grande valeur. Ce matériel très perfectionné permet un travail irréprochable en même temps qu’un gros rendement : 80.000 mètres carrés de carreaux aux dessins les plus variés et les plus nouveaux, telle est la puissance de cette manufacture.

Tous les produits de la Maison sont fabriqués par le procédé dit en « pâte riche » avec des ciments de premier choix, sans aucun mélange de chaux ; ils reçoivent, au moyen de presses hydrauliques très puissantes, une pression de 130.000 kilos, ce qui leur donne un brillant et une solidité parfaite.

A côté du carrelage ordinaire, l’usine Castan est la seule qui se soit spécialisée dans la fabrication du carrelage mosaïque dont nos lecteurs trouveront ci-après la reproduction d’un modèle.

La fabrication de ce carrelage est différente de celle des modèles courants. Chaque carreau se compose de 324 petits cubes serrés par un filet de couleur qui, lui, a également la même incrustation que les petits cubes eux-mêmes. Dans ce genre de travaux d’art, la fabrication comporte, en plus des modèles de tapis anciens, de nombreux dessins dont une grande partie est exposée à l’usine. De plus, toutes les commandes de dessins particuliers peuvent être exécutées dans un délai de trois mois grâce à l’outillage et à la main-d’œuvre spécialisée.

Henri Castan

La création de cette particularité de travail artistique est due aux nombreuses recherches et études poursuivies pendant quarante six ans par M. H. Castan, neveu de M. Louis Castan. Initié par son oncle, M. H. Castan s’efforce de donner à ses travaux un essor particulièrement remarquable en créant de nombreux modèles (plus de 100), de façon à avoir des collections complètes. Du reste ces mosaïques font actuellement l’admiration des artistes et architectes français ainsi que de tous les techniciens étrangers qui n’hésitent pas à les utiliser pour leurs décorations.

M. H. Castan, poursuivant son œuvre de vulgarisation artistique, a en préparation un choix nouveau de dessins dans lesquels il a apporté toute la fantaisie et l’originalité de sa conception.

Depuis sa création, cette Maison a eu tant de fois l’occasion de montrer ses aptitudes soit par la beauté et la pureté de ses mosaïques, soit par la valeur de ses produits ordinaires, que nous ne saurions publier ici toutes les références de premier ordre qu’elle offre aux administrations et au commerce.

Nous citerons parmi les plus importantes :

Petit Lycée de Ben Aknoun, Facultés de lettres et sciences d’Alger, Préfecture de Constantine, Hôpital de Mustapha, Collège de Blida, Hôpital du Dey, Hôtel de ville de Maison-Carrée, Crédit Foncier à Alger, Hôtel des PTT à Alger, Médersa d’Alger (où la fourniture comprenait exclusivement des dessins de pur style arabe. Dans ce genre, la Maison peut seule présenter la plus belle collection), Préfecture d’Alger, Galeries de France à Alger, Magasins Amaoua chaussures à Alger et Tunis, Théâtre de l’Alhambra à Alger, magasins Aux deux Magots, Clinique Laverhne… etc. etc.

Les produits Castan ont été récompensés d’une médaille d’argent à Alger en 1881, d’une médaille de bronze à Paris en 1899 et du Grand Prix de l’Exposition Coloniale de Marseille en 1906. Ils se sont peu à peu imposés partout par leurs qualités pratiques, décoratives et hygiéniques.

Les usines Castan qui se trouvent au Frais Vallon, peuvent être visitées par leur clientèle qui se rendra compte ainsi du soin apporté à la fabrication de tous ses produits, sous l’active et habile direction de M. Jean Galéa.

Salle de presse

Extrait d’un Article paru dans le Livre d’or du centenaire de l’Algérie Française (département d’Alger) 1930.

L'équipe du Mémoire Vive a rencontré M. René Teuma au C.D.H.A.

Il nous apprend que, de 1925 à 1955 l’affaire a été dirigée par M. Jean-Marie Galéa, le fils de Joseph créateur des Tuileries et Briqueteries de Maison-Carrée et beau-frère de M. Léon Eldin architecte ingénieur et créateur de l’usine de briques et de tuiles du Pont du Hamiz (commune de Rouïba) et qui à son arrivée en Algérie avait fondé les Plâtrières de Camp du Chêne à Médéa.

Léon Eldin avait en plus exercé les fonctions de premier adjoint au maire de Maison-Carrée pendant de longues années et il fit même fonction de maire pendant la guerre de 1914/18.

En avril 1955, Jean-Marie Galéa cède l’affaire « Carrelages et Mosaïques Algériens » à sa nièce Mme Teuma Gabrielle née Eldin et c’est son fils René Teuma qui va prendre la direction de l’affaire. Jusqu’en juin 1962 avec toujours une constante qualité de produits l’entreprise va poursuivre ses activités.

En voyant la photo de l’usine, c’est avec une certaine nostalgie, que René Teuma nous désigne le logement qu’il occupait à l’époque. Il attire notre attention sur la porte cochère à deux battants finement ouvragée, avec sur sa partie haute un moucharabieh surmonté d’une mosaïque multicolore.

Sur les côtés, deux allégories représentant, l’une l’été et l’autre l’hiver et sur les côtés deux magnifiques statues de femmes imitées de l’art romain.

Et c’est là que nous regrettons de ne pas avoir de photos couleurs de cette monumentale entrée de l’usine.

Gérard Séguy

Extrait du Mémoire Vive n°47