Histoire d'entreprises : les établissements Veuve Cote et Cie à Alger

Fournitures Générales pour Peintres et Droguistes

1901-1962

« Vve Cote » ! Marque familière à tous ceux qui ont vécu en Algérie jusqu’en 1962. Elle se retrouvait aussi bien sur les produits de droguerie d’usage ménager quotidien que sur ceux destinés aux entreprises de peinture-vitrerie et d’ébénisterie : javel Vve Cote, alcool à brûler Vve Cote, acétone Vve Cote,  essence de térébenthine Vve Cote, huile de lin Vve Cote, diluant Vve Cote, savon noir Vve Cote, balais, brosses, boîtes de vernis pour menuiseries, ferronneries, bateaux, et les peintures en tout genre Vve Cote… Sans oublier le « SaniCote », désinfectant au parfum et couleurs intéressantes !

Les camions et les voitures de livraison sillonnaient la ville d’Alger, facilement identifiables à leurs panneaux peints en rouge et où le nom était inscrit en grosses lettres blanches. Oui, vous vous souvenez, n’est-ce pas de ce logo, sur les pots de peinture ?

Angèle Lanoir Veuve Cote

Mais qui était donc cette Madame Vve Cote ?

En 1898, venant de Paris, après un voyage de 48 heures en bateau,  Angèle Charlotte Lanoir débarquait à Alger avec son mari Gustave Cote et leurs trois jeunes enfants, Henri, Georges et Juliette, curieuse de cette Algérie où dorénavant la famille allait se fixer.

Gustave Cote connaissait déjà le pays. Officier dans l’infanterie, il avait été nommé à Méchéria dans le sud algérien. Après avoir été libéré, ayant travaillé en métropole pour une maison de couleurs et vernis, il était venu régulièrement en Algérie visiter la clientèle. Séduit par le pays il décida de s’y installer et d’y créer sa propre maison de vente de vernis pour bateaux, ce qui fut fait en 1901.

Mais, en août 1902 c’est le drame : Gustave Cote meurt en sauvant un de ses amis de la noyade lors d’une tempête sur la plage de Mustapha.

L'usine de fabrication

Courageusement, à 32 ans, Angèle Lanoir décide alors de prendre la suite de l’affaire. Elle va l’étendre comme l’avait souhaité son mari afin de pouvoir élever ses enfants. Certes, il n’était pas facile, en ce début du XX° siècle, à une jeune veuve de s’imposer en tant que chef d’entreprise. C’est pourquoi, dès 1903 elle s’associa à François Alphonse Colombe et fonda la « Maison Vve Cote, fournitures générales pour peintres et droguistes ».

Les besoins étant importants dans un pays en plein développement, l’entreprise commença à réaliser de nombreuses et fructueuses affaires. Henri, l’aîné des enfants et Georges, son frère cadet participèrent très tôt à l’évolution et aux succès de l’entreprise aux côtés de leur mère et de son compagnon François Alphonse Colombe.

En 1910, Henri âgé de 21ans, fait son service militaire au 3° régiment de Zouaves, tout en surveillant d’un œil attentif l’affaire. Il  n’hésite  pas à donner conseils et marche à suivre pour son bon fonctionnement en attendant sa libération qui viendra en 1912. Cependant, en 1911, sans attendre son retour  la société en nom collectif « Veuve Cote et Cie » est créée.

Dès cette époque, la  marque commerciale va devenir la plus importante firme de droguerie de l’Afrique du Nord avec implantation de succursales à Alger, Blida, Bône, Constantine, Oran, Maison-Carrée, Sidi-Bel-Abbès, Sétif.

C’est aussi dans la ville d’Alger que vont se développer plusieurs drogueries à l’enseigne des Ets Vve Cote. Outre le magasin principal et l’usine de la rue Alfred Lelluch, les entrepôts du Boulevard Villaret Joyeuse à Belcourt, de nouvelles maisons de commerce de droguerie à cette enseigne s’ouvrent à travers la ville, rues : Michelet, Sadi Carnot, Rovigo, de Tanger. Puis c’est la création d’usines à Oran, Casablanca, Bône et Constantine.

Pour Casablanca c’est Paul Lionnet, mari de Renée Lanoir, qui va créer une succursale en 1930, elle s’appellera la « Somapedro » et perdurera jusqu’en 1973, pour disparaître, après la « maroquinisation », en mai 1974.

Ces implantations vont permettre à l’entreprise de décentraliser sa production pour des besoins parfaitement étudiés et reconnus par une clientèle croissante.

Fête de Noël

Pour la brosserie, les Ets Vve Cote avaient acheté un terrain où ils cultivèrent le sorgho afin de faire des balais et des brosses. Déjà, l’usine de produits chimiques, produits d’entretien et de broyage de peinture à Belcourt, leur avait assuré la possibilité de concurrencer les fournisseurs métropolitains, de ne plus en être tributaire, bien que continuant d’en représenter certains. La production sur place, mieux adaptée aux besoins de l’Algérie, permettait de fournir plus rapidement les acheteurs, du particulier à la plus importante des entreprises, et cela jusqu’en 1962.

Angèle Lanoir s’éteignit en 1937, laissant à ses héritiers une maison prospère pour encore de nombreuses années en ayant réalisé les espérances de son mari Gustave Cote.

Henri et Georges Cote devinrent alors co-gérants de la Maison Vve Cote, Henri en étant directeur général. Il fut également dans les années trente Président du Tribunal de Commerce d’Alger, puis de 1946 à 1948 Président de la Confédération Générale du Patronat en Algérie.

Au cours des années, les deux frères ne cessèrent de mettre en place de nouveaux projets. Ils surent se faire apprécier de leur personnel et formèrent leur fils et leur gendre qui furent intégrés à la Maison Cote suivant le souhait d’Angèle Charlotte Lanoir.

Après 1962, les Ets Vve Cote se replièrent de ce côté-ci de la Méditerranée, mais ceci est une autre histoire…

Marie-José Opper

Extrait du Mémoire Vive n°52

Sources : voir le site ES’MMA

Repas de fin d'année