L'Algérie des peintres 1830-1930

Une magnifique exposition vous est proposée en cette période estivale au Musée d'Art de Toulon, du 18 juin au 09 octobre 2022.

 

« Le voyage en Algérie devient pour les peintres aussi indispensable que le Pèlerinage en Italie. Ils vont là apprendre le soleil, étudier la lumière, chercher des types originaux, des mœurs, des attitudes primitives et bibliques. »

Théophile Gautier, Abécédaire du Salon, 1861

Au XIXe siècle, l'attrait pour l'Orient se manifeste dans plusieurs domaines artistiques ; en littérature, en musique et dans les arts plastiques. Le succès des Femmes d'Alger dans leur appartement d'Eugène Delacroix en 1834, les écrits de Victor Hugo, Les Orientales en 1829, et d'Alphonse de Lamartine, Voyage en Orient en 1835 déclenchent un désir de voyage chez des peintres, des dessinateurs et plus tard chez des photographes.

Pendant près d'un siècle, de 1830 à 1930, l'Algérie suscite l'intérêt de nombreux artistes en quête d'exotisme, de séjours touristiques ou à la recherche d'un nouveau langage pictural. Sur « l'autre rive de la Méditerranée », la lumière, les couleurs, les paysages variés et d'une grande beauté, les scènes de vie quotidienne, les architectures typiques offrent un répertoire infini de sujets.

Alger est bien souvent le point de départ de la découverte du pays. Certains n'y font que passer, d'autres s'y installent quelques temps ou durablement. Pendant la « période de découverte » (1830-1850), la curiosité conduit Delacroix, Fromentin, Chassériau... à recenser et à illustrer les types humains, les coutumes, le cadre de vie. Ils manifestent leur volonté de noter ou de transcrire « les images » observées au moyen de dessins, d'aquarelles, de carnets de croquis et d'écrits. Ils recherchent avant tout l'authenticité et le pittoresque. Leurs œuvres provoquent l'émulation d'artistes qui viendront à leur tour visiter l'Algérie.

Au milieu du XIXe siècle, les conditions de déplacement à l'intérieur du pays s'améliorent. Les artistes n'hésitent pas à quitter les grandes villes, Alger, Oran, Constantine, pour s'aventurer en Kabylie ou vers le Sud, à la conquête de nouveaux sujets. Sur les traces des premiers « dessinateurs-voyageurs », ils s'exilent vers le Sahara. Le désert est un lieu privilégié des paysagistes orientalistes : vues panoramiques, vastes étendues, caravanes, campements, populations berbères sont réunis dans des paysages époustouflants et saisissent l'attention des peintres mais aussi des premiers photographes que les espaces vides fascinent. Dans cette présentation, un dialogue s'établit entre peintures et photographies sur des thématiques communes.

Au début du XXe Siècle, La Villa Abd-El-Tif à Alger s'ouvre aux tendances de l'art moderne et accueille de jeunes artistes français et européens. Dans ce lieu de rencontres et d'échanges, favorable au développement d'un nouveau langage pictural, une nouvelle conception de la peinture orientaliste se met en place. Le pittoresque qui caractérise les œuvres des premières années de découverte de l'Orient s'atténue au profit d'une vision d'un Orient vécu. La représentation du paysage se fait plus systématique, la palette des artistes s'éclaircit, le style s'épure. Les grandes villes portuaires et les villages témoignent d'un rapport plus intime avec le pays et ses habitants. Les vues de la baie d'Alger et de la Casbah sont complétées par celles de la place du Gouvernement, de l'opéra et des grands boulevards, mais aussi celles des calanques de Bougie ou de la côte oranaise.

Cette exposition invite le visiteur à une promenade artistique depuis Alger jusqu'aux portes du désert, en traversant les oasis de Biskra, Bou-Saâda et El Kantara.

Elle met à l'honneur des dessinateurs orientalistes et des peintres de l'École d'Alger et propose la découverte ou la redécouverte d'un pays de couleurs et de lumières aux paysages emblématiques qui pendant plus d'un siècle ont inspiré et émerveillé de nombreux artistes.

Brigitte GAILLARD

Conservatrice en chef du Musée d’Art de Toulon,

Commissaire de l’exposition